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Quel est votre diagnostic ? C'est la teigne du citronnier

Des feuilles décapées et rongéesEn novembre, au sein d'une exploitation spécialisée dans la culture des plantes méditerranéennes hors-sol sous abri, le chef de culture observe un lot de cédratiers (Citrus medica) originaire de Sicile, dont les feuilles terminales sont décapées et rongées.

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DÉTECTION

L'origine des plants d'agrume, les symptômes et les caractéristiques morphologiques des chenilles permettent d'identifier la teigne du citronnier ou teigne des fleurs d'oranger (Prays citri), de l'ordre des lépidoptères et de la famille des Yponomeutidae. Cet insecte a été décrit la première fois par Millière en 1873. Sa gamme d'hôtes s'étend à tous les agrumes du genre Citrus, avec une préférence pour le limettier acide (C. aurantiifolia), le citronnier (C. limon), le cédratier (C. medica), et à un degré moindre, pour le pamplemoussier (C. maxima = C. decumana), le bigaradier (C. aurantium), l'oranger (C. sinensis), le mandarinier (C. reticulata = C. deliciosa). Quelques rares cas d'infestations ont été signalés sur d'autres rutacées (Casimiroa edulis, Murraya exotica), ainsi que sur des végétaux d'autres familles botaniques : Achras sapota (sapotacées), Ligustrum lucidum (oléacées). Bien qu'il soit très répandu dans le bassin méditerranéen, ce ravageur a probablement été importé d'Asie tropicale, sa région d'origine. Il est également présent en zone tropicale humide (Réunion, Seychelles, île Maurice, Philippines, Sri Lanka, Samoa). Compte tenu de sa distribution territoriale importante en zone agrumicole communautaire, la teigne du citronnier n'est pas réglementée dans l'Union européenne.

En revanche, dans les départements français d'outre-mer des Antilles et de la Guyane, l'importation des plantes présentant cette espèce sur leurs parties aériennes n'est pas autorisée. De plus, l'introduction de racines ou parties souterraines, plantules, plants (*), boutures (*), greffons (*), des végétaux des genres Aeglopsis, Afraegle, Arracacia, Citropsis, Citrus, Clausena, Fortunella, Poncirus, Pamburus et leurs hybrides, est interdite aux Antilles et en Guyane. Des interdictions selon les origines du matériel végétal et des exigences particulières s'appliquent aussi à l'introduction de fruits frais d'agrumes dans les Dom, mais ne font pas expressément référence à P. citri. Les fruits doivent, en outre, être débarrassés de leur pédoncule et des feuilles. On retrouve la teigne du citronnier dans l'arrêté ministériel du 31 juillet 2000 modifié, établissant la liste des organismes nuisibles aux végétaux, produits végétaux et autres objets soumis à des mesures de lutte obligatoire, dans les paragraphes consacrés aux Dom.

CONFUSIONS POSSIBLE

La teigne du citronnier est souvent détectée au cours de son activité larvaire. À ce stade, des risques de confusion existent avec d'autres teignes sur des agrumes importés : Prays endocarpa (sous-continent indien, Asie du Sud-Est), Prays endolemma (Philippines) et Prays nepholemima (Bornéo). En cas de doute, contacter le service régional chargé de la protection des végétaux. En cas de dégâts foliaires, une méprise est possible avec la chenille mineuse des agrumes (Phyllocnistis citrella). Mais dans ce cas, la consommation des tissus forme une mine sinueuse dans le parenchyme, entre les deux épidermes, où l'on détecte également une traînée sombre de déjections. Un autre insecte, de l'ordre des coléoptères, ronge les feuilles au stade adulte. Il s'agit du charançon des agrumes (Diaprepes abbreviatus). Sur les fruits, une observation attentive des larves doit permettre de distinguer P. citri de la mouche méditerranéenne des fruits (Ceratitis capitata), dont les asticots sont apodes. Au stade adulte, une confusion est possible avec un papillon très semblable d'aspect : la teigne de l'olivier (Prays oleae). La distinction en laboratoire requiert une étude de l'appareil reproducteur mâle ou génitalia, ainsi que de l'ornementation des ailes et de l'abdomen.

TRANSMISSION ET DÉVELOPPEMENT

La teigne du citronnier produit jusqu'à onze générations par an en Sicile et certainement autant dans tout le bassin méditerranéen, avec une hivernale, trois printanières, quatre estivales et trois automnales. En production horticole sous serre chaude ou tempérée, le nombre de générations annuelles est également important et permet de rencontrer P. citri à tous les stades durant tous les mois de l'année. Le cycle biologique complet de l'insecte se déroule en moins de trente jours durant les mois d'été et en soixante jours en hiver. Les températures relativement élevées sont favorables au ravageur, également favorisé par l'échelonnement des floraisons de diverses espèces ou variétés de Citrus dans une même zone, ainsi que par l'abondance d'agrumes hors des vergers commerciaux (jardins). La durée des stades de développement de la teigne est inversement proportionnelle à la température. Elle est aussi proportionnelle à l'humidité relative, mais pas de manière significative.

L'imago est un petit papillon ou microlépidoptère gris terne de 10 à 12 mm d'envergure. Ses antennes sont relativement courtes. Ses ailes sont fortement frangées : les antérieures, gris brunâtre chagriné, s'assombrissent sur le bord inférieur et à l'apex ; les postérieures très étroites, gris brun uniforme, sont enfumées aux extrémités. Dès sa sortie, le papillon se nourrit de substances sucrées. Il vole le jour et au crépuscule, se tenant au repos dans les plantes hôtes. L'accouplement a lieu peu après l'émergence. Quelques heures plus tard, la femelle pond un à trois oeufs, de préférence sur les pièces florales. En l'absence de boutons, les oeufs sont déposés sur des bourgeons ou sur des jeunes pousses. La fécondité totale observée est de soixante à cent cinquante oeufs, voire plus. L'oeuf est difficile à repérer. Il est aplati, blanchâtre, ovale, avec un chorion réticulé, et il mesure 0,2 x 0,15 mm. Lors de l'éclosion, apparaît une très petite larve transparente. Elle pénètre rapidement dans les boutons. Après la nouaison, elle s'attaque au jeune fruit dans lequel elle pénètre latéralement par le réceptacle. En fin de développement, après cinq mues, la chenille mesure 6,5 mm de long pour 1,8 mm de large. Son corps présente un coloris brun clair, tandis que la tête et la plaque thoracique sont plus foncées. En fin de développement, la chenille se nymphose dans un cocon blanchâtre.

Par Jérôme Jullien, expert horticole

(*) Des dérogations peuvent être accordées pour des semences, des plants issus de cultures in vitro, des boutures ou des jeunes plants certifiés provenant de laboratoires ou d'établissements agréés reconnus par l'Union européenne, dans certaines conditions. Ces dérogations sont soumises à la délivrance préalable d'une autorisation technique d'importation (A.T.I.) remise par le service chargé de la protection des végétaux du Dom destinataire.

Prays citri Sur la face inférieure d'une feuille, la chrysalide de Prays citri est dans un cocon très lâche, blanc et effilé, fixé le long de la nervure principale.

PHOTO : JÉRÔME JULLIEN

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